Le feuilleton Huawei vient apporter un peu plus d’eau au débat sur notre dépendance au numérique (et plus particulièrement aux GAFAM) : épisode 1 Google interdit à Huawei d’utiliser Android, épisode 2 ARM interdit au géant chinois d’utiliser ses processeurs.
En quelques jours le numéro 2 mondial du smartphone se retrouve sans système d’exploitation et sans processeur à cause de la guerre commerciale entre les USA et la Chine. Autant dire que le numéro 2 mondial du smartphone ne peut plus fabriquer de smartphones et vient d’être balayé de la carte.
Vous me direz : pas grave je n’ai pas de téléphone de cette marque. Certes… mais je ne peux que constater qu’il suffit d’un peu de poids politique pour tuer une société aussi grosse soit-elle. Si au moins c’était un fabriquant de pesticides ont pourrait penser la cause juste et s’en réjouir…
Là où cela fait réfléchir c’est que cela nous montre le pouvoir des Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft (GAFAM). Ces géants américains et leurs proches prouvent qu’il suffit d’une décision (qui leur a certes été imposée) pour rebattre le marché du numérique.
Et si finalement nous autres, particuliers et professionnels, étions tout aussi fragiles face à ces sociétés ?
Pouvons nous imaginer supprimer de notre environnements tous les produits et services de ces sociétés ? L’être humain n’étant pas connu pour sa volonté à résister aux addictions, je vous propose le scénario suivant : une guerre économique oppose l’Europe aux USA, les GAFAM sont sommés de ne plus nous fournir de services… oui c’est du délire, mais rappelons nous que c’est ce que vit Huawei en ce moment, la réalité peut donc parfois rattraper la science fiction.
Ce scénario catastrophe nous priverait du moteur de recherche Google, utilisé par plus de 80% des français : sauvés il nous reste Qwant.
Il nous priverait des systèmes Android, iOS, MacOS, Windows : autant dire qu’il va falloir dire adieu à nos smartphones et ressortir les téléphones à clapet Sagem. Pour les ordinateurs tout le monde sur Linux… une belle idée, mais quel travail de migration et de formation ! Construire une ligne TGV c’est facile en comparaison.
Côté messagerie adieu Gmail, Yahoo, Outlook, Messenger, Whatsapp, Skype, iMessage,… pour les emails il y a des fournisseurs en Europe et nous pouvons compter sur Thunderbird, mais quel changement pour une majorité d’utilisateurs. Pour la discussion instantanée il y a nettement moins de choix… ce serait l’occasion de découvrir de nouveaux services, mais cela perturberait aussi beaucoup nos communications.
Côté bureautique bye-bye les sacro-sains Word et Excel. Heureusement Libre Office sera là pour nous sauver, mais je connais un paquet d’employés de bureau qui grinceraient des dents… sans compter les problèmes de compatibilité avec certains logiciels métiers.
Côté navigateurs cela sera l’occasion d’oublier Google Chrome et de passer à Opéra. Pour notre vie privé ce n’est probablement pas plus mal, mais beaucoup de personnes auront besoin de se faire aider pour réussir cette transition.
Nous dirons également adieu à Facebook. Possible que dans 9 mois nous assistions à un baby boom suite à cela. Un constat… il n’y a pas vraiment d’alternative européenne.
Pour les pros bye-bye Linkedin… Viadéo retrouvera des couleurs.
YouTube ne sera plus accessible… Viméo s’en réjouira, et nos opérateurs devraient faire de grosses économies de bande passante. Au final les chaînes TV retrouveront probablement une audience perdue.
Côté cloud ça serait l’Armageddon… certes vos stockages en ligne sur Google Drive, OneDrive, iCloud disparaitront, mais ce n’est rien à côté des services de stockage pour les pros que sont Azure ou Amazon Web Services. Nombre de sites web et de bases de données ne pourraient plus fonctionner.
Certes ce scénario catastrophe n’arrivera pas car les GAFAM ne peuvent se passer de nos données notre argent. Mais en toute objectivité nous aurions bien du mal à nous passer de leurs services.
L’Amérique domine notre monde numérique, l’affaire Huawei nous rappelle sa puissance. L’avenir nous dira ce qu’il advient de Huawei, mais je me plait à espérer que cela pourra créer une petite étincelle nous incitant à réduire cette dépendance face aux USA.
Rêvons de l’émergence d’une alternative viable à Andoid et iOS… rêvons de composants électroniques dont les brevets ne soient pas détenus par les GAFAM et leurs proches (oui ARM est anglais), et pourquoi pas dans un monde parfait de composants open source… Ce petit tremblement de terre causé par la chute du géant Huawei devrait nous inciter à ouvrir nos esprits et à regarder plus objectivement nos habitudes de consommation numérique. Plus ces sociétés sont grosses, plus elles ont de pouvoir sur nous et notre économie… et plus elles peuvent nous rendre dépendantes à leurs services… pour mieux grossir. Qui sait, si ça se trouve elles seront assez puissante pour éviter que le président américain ne leur coupe le marché chinois… ironique non ?